Yacine Louati, figure clé du volley français, revient sur son parcours marquant. Un témoignage inspirant d’un athlète passionné.
Yacine Louati brille toujours sur les parquets à 32 ans. Il incarne talent, charisme et humilité. Ce joueur emblématique de l’équipe de France a marqué les esprits aux derniers Jeux Olympiques. Il partage son parcours, ses inspirations et les défis de sa carrière. Entre passion pour le volley et anecdotes de vie, découvrez son regard sur l’avenir.
Yacine, vous êtes l’un des rares joueurs de volley à avoir remporté deux médailles d’or consécutives aux Jeux Olympiques. En quoi cela a-t-il influencé votre vie quotidienne et modifié votre approche du sport ?
Honnêtement, la première médaille d’or a tout changé. La deuxième, c’est un peu la cerise sur le gâteau. Cet été, c’était l’occasion de marquer un peu plus l’histoire, avec une belle génération. C’est une immense fierté d’avoir écrit cette histoire avec ce groupe, et de la manière dont cela s’est fait.
Avant vous, seuls les États-Unis, en 1984 et 1988, avaient réalisé cet exploit. Vous sentez-vous désormais porteur d’un héritage particulier pour le volley français ?
Un peu, forcément, car le volley français est en plein essor, notamment avec les équipes jeunes qui réalisent de très bonnes performances en sélection nationale. Cela augure bien pour l’avenir. Nous, on a fait notre part. On espère pouvoir influencer le volley français et améliorer sa médiatisation, car c’est encore un sport relativement peu diffusé, bien qu’il soit majeur au niveau mondial. On aimerait que cela change en France.
Le fait de gagner devant le public français lors des JO de Paris, qu’est-ce que cela vous a apporté ? Comment avez-vous ressenti cette victoire, en triomphant chez vous, devant votre propre public ?
Des souvenirs incroyables. Aussi, des émotions que je n’avais probablement jamais ressenties auparavant. Tokyo, c’était unique, et là, gagner avec 13 000 personnes présentes pour nous, en jouant à la maison, entouré de tout ce monde, c’était complètement fou. Je ne pense pas avoir jamais vécu quelque chose de similaire, et je pense que cela ne pouvait arriver qu’à Paris.
Après ces deux médailles d’or, comment envisagez-vous la fin de votre carrière ? Qu’est-ce qu’il vous reste à accomplir ?
On sait qu’on ne fera pas mieux. Si ce groupe gagnait à Los Angeles, ce ne serait pas la même chose qu’à Paris. Dans l’histoire, ce serait encore plus incroyable, mais ça me semble aussi irréel, car cette génération arrivera à terme dans quatre ans. Il reste encore des compétitions importantes à disputer, comme le championnat du monde qui approche.
À 32 ans, évoluer dans un club comme Milan doit être un défi quotidien. Qu’est-ce qui vous pousse à continuer ?
Le volley n’a que rarement été un travail pour moi. La plupart du temps, c’est un divertissement et une passion. J’ai essayé de donner tout ce que je pouvais pour ce sport, et en retour, le volley m’a énormément apporté, que ce soit en termes d’émotions, de connaissances, d’amis ou même de ma copine. Aller m’entraîner reste toujours un plaisir, et j’espère ne jamais perdre cette motivation. En tout cas, plus je continue, plus j’aime ça, donc j’ai l’impression d’être encore loin de la fin, et j’espère que mon corps tiendra le plus longtemps possible.
Vous avez partagé des moments intenses avec vos coéquipiers en sélection nationale. Que représentent pour vous les liens que vous avez tissés avec eux ? Est-ce que cela se ressent sur le terrain ?
Tout le monde le dit et nous le savons. Ce groupe, je pourrais en parler toute la nuit, un groupe qui incarne de grandes valeurs. C’est une équipe très unie, où chacun respecte profondément l’autre. Nous avons traversé des moments difficiles, mais aussi vécu de très belles victoires, et cela nous a forcément encore plus soudés.
« La musique a toujours occupé une place essentielle dans ma vie »
Passionné de musique, avec un passé au conservatoire de Montpellier, vous jouez de la trompette et du piano. Qu’est-ce qui vous attire dans la musique et comment jonglez-vous avec votre carrière sportive ?
Pour la petite histoire, tout commence avec mon père, qui jouait au volley. Dès l’âge de 2 ou 3 ans, j’étais en couche-culotte dans les salles de match, accompagné par lui. C’est donc tout naturellement que j’ai commencé à m’intéresser au sport.
En parallèle, la musique est entrée dans ma vie grâce à mon frère, mon aîné de 3 ou 4 ans. Quand il a commencé à en jouer, j’ai voulu faire comme lui. La musique, tout comme le volley, est rapidement devenue une véritable passion. À tel point que j’ai poursuivi mes études musicales jusqu’à mes 20 ans. J’ai terminé le conservatoire de Montpellier, puis celui de Tourcoing, où j’ai obtenu plusieurs prix. La musique a toujours occupé une place essentielle dans ma vie, tout comme le volley.
Pendant ma jeunesse, ces deux passions ont rythmé mon quotidien. L’école, c’était une obligation, mais je faisais de mon mieux pour ne pas perdre de temps. À 18 ans, j’étais à un tournant : je commençais ma première saison professionnelle de volley tout en voulant terminer mon prix au conservatoire de Montpellier. Ensuite, je suis parti à Tourcoing.
C’est à ce moment-là que le dilemme s’est posé : que faire de ma vie ? Devais-je me consacrer au volley ou poursuivre dans la musique ? J’ai envisagé de tenter les examens d’entrée au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, mais la logique m’a poussé à choisir le volley, qui était une opportunité à saisir immédiatement. Je me suis dit que la musique pourrait toujours venir après.
La musique et le sport exigent toutes deux une discipline et un sens du rythme particuliers. Est-ce que cela influence d’une certaine manière votre jeu ou votre mentalité sur le terrain ?
Je pense que cela m’apporte une ouverture différente sur le monde, quelque chose que mes coéquipiers ne connaissent pas forcément. Le fait d’avoir exploré d’autres horizons et de ne pas avoir baigné uniquement dans le volley m’a permis de rencontrer des personnes différentes et de développer d’autres passions.
Là où cela m’aide le plus, c’est sans doute pour maintenir un équilibre dans ma vie. Quand le volley ne se passe pas bien, je me tourne davantage vers la musique : je joue un peu plus de piano ou de trompette. C’est une sorte de soupape, une échappatoire qui me permet de relâcher la pression. La musique m’aide à m’évader, à oublier les sensations désagréables quand les choses ne vont pas comme je le voudrais.
Quel serait le meilleur conseil que vous donneriez à un jeune qui commence le volley aujourd’hui ? Si vous deviez transmettre un seul message aux nouvelles générations, quel serait-il ?
Je dirais qu’il est essentiel de toujours garder une bonne dose de passion et d’inspiration. Ce que j’ai fait, en grandissant dans le monde du volley, c’est m’inspirer des plus grands. Aujourd’hui, en France, je vois de nombreux joueurs très inspirants. Je ne parle pas de moi, mais de mes coéquipiers, qui comptent parmi les meilleurs à leur poste.
Je pense que cela s’applique à tous les sports. Il est important de regarder, d’apprendre, de s’inspirer. En France, nous avons la chance d’avoir des structures bien développées. Cette richesse permet à chacun de pratiquer et de s’épanouir dans le sport qu’il aime. Le conseil ultime que je donnerais, c’est de toujours pratiquer un sport par passion et par plaisir. Devenir sportif professionnel, c’est un rêve que beaucoup nourrissent, mais peu réalisent. Et même pour ceux qui y parviennent, ce n’est pas forcément la vie idéale qu’on imagine. C’est une vie qui exige de nombreux sacrifices.
Je suis conscient d’être chanceux d’avoir vécu cette expérience, mais elle comporte aussi ses défis. Que l’on pratique un sport pour en faire un métier ou simplement pour le plaisir, l’important est de toujours préserver cette joie. Si on n’éprouve plus de plaisir, il faut se poser les bonnes questions et réfléchir à ce que l’on souhaite faire vraiment.
« Zidane m’a marqué par son calme »
Y a-t-il un ou plusieurs sportifs qui vous inspirent ?
J’ai plusieurs sources d’inspiration. Je ne pourrais pas citer un nom en particulier, car chacun m’a apporté quelque chose de différent. Par exemple, un joueur pouvait m’inspirer par son caractère et le charisme qu’il dégageait, un autre par son style, un autre encore par sa manière de jouer ou de faire une passe.
Ce n’est pas limité au volley. Dans le football, Zidane m’a marqué par son calme, Federer pour son élégance et sa sérénité, et Nadal pour sa hargne et sa détermination. Ce n’est pas qu’un seul joueur qui m’inspire, mais plutôt un mélange : je prends des éléments de chacun, que ce soit leur attitude, leur technique ou leur personnalité.
C’est comme ça que je l’ai toujours perçu, notamment dans le volley. Je préfère m’enrichir des forces de plusieurs modèles plutôt que de me concentrer sur un seul.
Comment aimeriez-vous qu’on se souvienne de Yacine Louati, tant en tant que joueur de volley qu’en tant qu’homme, après votre carrière ?
Pour moi, il est essentiel de me montrer aussi humain et généreux que possible. Comme je le disais, être sportif de haut niveau demande de nombreux sacrifices, mais cela m’a aussi offert des opportunités incroyables. Je me considère vraiment chanceux dans la vie. Grâce au volley, j’ai vécu des expériences extraordinaires.
J’essaie de redonner un peu de cette chance autour de moi. J’espère que les gens me perçoivent comme une personne généreuse et attentionnée, car c’est ce que je m’efforce d’être. Que ce soit au sein de mon équipe, avec les supporters, ou avec les personnes qui travaillent dans les clubs et les associations, j’essaie toujours de faire le bien et de créer un impact positif. C’est une valeur qui m’est très chère et qui me tient vraiment à cœur.
Avez-vous une anecdote marquante à propos des JO ?
C’est une anecdote assez drôle qui s’est passée la semaine dernière. On jouait contre Piacenza, et donc contre Antoine Brizard. Antoine est un grand ami, presque comme un frère pour moi. On joue ensemble en équipe de France et on est très proches. C’était vraiment particulier de l’affronter, je crois que c’est seulement la deuxième fois que ça arrive.
Le match ne s’est pas du tout passé comme on l’aurait voulu : on a pris une vraie fessée et perdu 3-0. On n’a quasiment pas touché la balle ! Pourtant, en sortant du match, je n’étais même pas triste. En fait, j’étais presque content pour Antoine, parce qu’il avait été incroyable. Il a joué un match exceptionnel, et je ne pouvais qu’être admiratif.
Après coup, j’ai réalisé que j’avais probablement perdu en partie parce que je passais mon temps à le chercher du regard et à rigoler avec lui. C’est un peu l’esprit qu’on a dans l’équipe de France : toujours dans la déconne, à se lancer des petits pics, à rire ensemble. Avec Antoine, c’était exactement ça.
Finalement, même si le match a été une grosse déception, sur le plan personnel, je me suis senti assez bien. Cette atmosphère un peu détendue, presque comme en équipe nationale, m’a permis de relativiser, et c’est en grande partie grâce à Antoine.
Yacine Louati
Pays : France
Âge : 32 ans
Poids : 92 kg
Sport : VolleyBall
Spécialité(s) : Réceptionneur-attaquant
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